“Celui qui ne fait jamais d’erreur ne fait jamais rien.” Dans les établissements de santé, l’erreur est humaine, voire inévitable. Mais quand elle devient taboue, elle se répète. C’est tout l’enjeu de la culture de l’erreur dite “apprenante” : transformer chaque incident en opportunité de progrès, au service de la qualité des soins et de la sécurité des patients. Encore faut-il réussir à l’ancrer dans le quotidien. Alors, comment implémenter la culture de l’erreur apprenante dans votre établissement ?
- Le principe de culture de l'erreur apprenante
- Pourquoi adopter une culture de l’erreur apprenante dans un établissement de santé ?
- Quels sont les freins à surmonter lors de la mise en place d’une culture de l’erreur apprenante ?
- Comment implémenter une culture de l'erreur apprenante ?
- Un enjeu pour la sécurité médicamenteuse
Le principe de culture de l'erreur apprenante
La notion de culture de l’erreur apprenante s’inspire des travaux menés dans l’aéronautique, puis en milieu hospitalier. Elle repose sur un changement de posture collectif : passer d’une logique de sanction ou de déni, à une logique d’analyse, de compréhension et d’amélioration.
Cela implique :
- De considérer l’erreur comme un symptôme d’un dysfonctionnement systémique, et non comme une faute individuelle.
- De créer un environnement bienveillant, dans lequel les professionnels peuvent signaler un incident sans crainte de blâme.
- De formaliser les retours d’expérience, pour qu’ils servent à tous.
Pourquoi adopter une culture de l’erreur apprenante dans un établissement de santé ?
Implémenter une culture de l’erreur apprenante a des bénéfices multiples, tant pour les patients que pour les soignants et la structure dans son ensemble.
Améliorer la sécurité des soins
Un environnement où les erreurs sont signalées permet de repérer les incidents précocement, d’identifier les facteurs contributifs, et de mettre en œuvre des mesures correctrices pertinentes. Le tout sans attendre qu’un événement grave se produise.
Valoriser les équipes
Les professionnels de santé sont souvent les premiers à repérer des dysfonctionnements. Leur permettre de les partager, de participer à leur analyse, et de contribuer aux solutions est une forme de reconnaissance de leur expertise et de leur engagement.
Renforcer la qualité du travail
En traitant les erreurs comme des opportunités d’apprentissage, les équipes peuvent travailler dans un climat plus serein, sans peur du blâme, et avec un meilleur alignement sur les objectifs communs de qualité et de sécurité.
Restaurer la confiance des patients.
Transparence, responsabilité, amélioration continue : ces trois piliers renforcent la relation entre l’établissement et les usagers. Une structure qui reconnaît ses limites, agit pour les corriger, et met les patients au cœur de sa démarche inspire confiance.
Quels sont les freins à surmonter lors de la mise en place d’une culture de l’erreur apprenante ?
Si le principe semble faire consensus, la mise en œuvre de cette culture reste un défi dans de nombreux établissements. Plusieurs freins persistent :
- Une culture du blâme encore ancrée, qui associe erreur à faute individuelle. Cela freine le signalement, favorise le repli, et fait passer à côté de nombreuses opportunités d’amélioration.
- Le manque de temps et de moyens : dans le quotidien souvent tendu des soignants, prendre le temps de déclarer, d’analyser, de formaliser un retour d’expérience peut sembler secondaire, voire inaccessible.
- L’absence de cadre structurant : lorsqu’il n’existe pas de processus clair pour recueillir et traiter les erreurs, ou que les retours d’expérience ne sont pas exploités, la démarche perd en efficacité et en crédibilité.
- Un engagement insuffisant de la gouvernance ou de l’encadrement : sans exemplarité au sommet, ni reconnaissance des efforts déployés par les équipes, la dynamique ne peut s’installer durablement.
Comment implémenter une culture de l'erreur apprenante ?
Instaurer une culture de l’erreur apprenante ne se fait ni en un jour, ni par décret. Il s’agit d’un travail progressif, qui passe par des actions ciblées, visibles et cohérentes.
1. Faciliter le signalement des événements indésirables.
Cela implique de simplifier les outils, de former les professionnels à leur utilisation, et de clarifier ce qui doit être signalé. Il faut aussi valoriser les déclarants : remercier plutôt que reprocher.
2. Organiser des temps de retour d’expérience (REX).
Qu’il s’agisse de réunions régulières, de RMM ou d’ateliers interprofessionnels, ces temps doivent être menés dans un cadre bienveillant, avec une méthodologie claire. L’objectif : comprendre, pas juger.
3. Communiquer sur les actions entreprises.
Partager les enseignements tirés d’une erreur, les mesures mises en place, les résultats obtenus : cela permet à tous de se sentir concernés, et montre que l’établissement apprend réellement de ses incidents.
4. Former les cadres et les équipes à cette culture.
Le changement de regard sur l’erreur ne va pas de soi. Il nécessite des repères, des outils, et un accompagnement. Des sessions de sensibilisation peuvent être organisées pour créer une base commune. La formation continue des établissements de santé est, là encore, essentielle pour une équipe qui parfait chaque jour ses compétences.
5. Intégrer cette culture dans la politique qualité-gestion des risques.
Plutôt que d’être portée uniquement par quelques convaincus, elle doit s’ancrer dans les documents cadres, les projets d’établissement, les évaluations internes. C’est à ce prix qu’elle devient une réalité partagée.
Un enjeu pour la sécurité médicamenteuse
Parmi les erreurs les plus fréquemment signalées à la HAS entre 2016 et 2019, trois catégories ressortent nettement : erreur de dose, erreur de médicament et erreur de patient. À elles seules, elles représentent une part importante des événements indésirables graves liés au circuit du médicament — avec 65 % d’entre eux survenant au moment de l’administration.
Ces erreurs, souvent multifactorielles, illustrent bien les limites des approches purement individuelles. Elles mettent en lumière la nécessité d'une coordination rigoureuse, de bonnes pratiques partagées et de procédures solides, à chaque étape : prescription, préparation, rangement, paramétrage des dispositifs, et surtout communication entre professionnels.
Elles rappellent aussi l’intérêt d’une analyse collective, structurée et sans jugement, permettant d’en tirer des enseignements concrets. Plusieurs établissements s’appuient d’ailleurs sur des formations construites autour de cas réels, pour renforcer les vigilances à adopter et structurer les démarches de sécurisation. C’est le cas, par exemple, de modules qui abordent la méthode REMED, les paramétrages des dispositifs médicaux, ou encore la place du conditionnement et de l’organisation dans la prévention des erreurs.
L’objectif est toujours le même : transformer les incidents passés en actions préventives concrètes, pour sécuriser le parcours du médicament dans son ensemble. C’est pourquoi, la formation Erreur médicamenteuse vous accompagne à intégrer la culture de l’erreur apprenante.
Transformer l’erreur en levier d’apprentissage collectif, c’est un pari de confiance, de lucidité et d’humilité. C’est aussi une des voies les plus efficaces pour faire progresser la qualité des soins, renforcer la cohésion des équipes, et garantir une meilleure sécurité aux patients. Une culture, qui se construit pas à pas, et dont les effets se mesurent à long terme.
Cet article a été validé par des professionnels de santé et vérifié par des sources sûres au moment de sa publication. Il ne prétend cependant pas à l’exhaustivité des informations fournies. Le présent article n’a qu’un but informatif et ne remplace pas une formation ou un conseil médical.