Si le numérique a fait son entrée en pharmacie dans les années 80, avec le tiers payant et la carte vitale, le mouvement s’est accéléré ces dernières années. Selon une enquête Call-Médi-Call, 3 pharmaciens sur 4 considèrent aujourd’hui ce virage numérique comme un “progrès nécessaire”. Mais pour qui ?
Prise de rendez-vous en ligne, click & collect, téléconsultation… En réduisant les contacts et les contaminations lors de la pandémie, la numérisation a pris tout son sens et s’est ancrée dans la relation entre les Français et leurs pharmaciens. De quoi renforcer la révolution numérique entamée par le dernier Ségur. Lancée en 2020, cette grande concertation a fait de la numérisation des services de santé une priorité du Ministère avec une enveloppe de 2 milliards d’euros destinée, en grande partie, au déploiement de Mon Espace Santé.
Mieux accompagner les patients
Clé de voûte de la numérisation, Mon Espace Santé vise l’interopérabilité des services de santé. Ce carnet de santé numérique permettra de regrouper tous les documents médicaux des Français : interventions, prescriptions, résultats d’analyse… Les pharmaciens pourront y accéder et offrir un meilleur suivi aux patients grâce à une connaissance complète de leur parcours de santé.
L’e-ordonnance, obligatoire fin 2024, pourra quant à elle détecter les différences entre ce qui est prescrit et ce qui est délivré après bipage des produits par le pharmacien. De quoi diminuer le taux d'erreur au comptoir.
“La qualité du suivi va augmenter mais le temps passé par les pharmaciens aussi. Il faudra prendre connaissance de tous ces documents”, remarque néanmoins Philippe Besset, président de la Fédération des Syndicats Pharmaceutiques de France. “Mais grâce au numérique, on va être des pharmaciens augmentés. Et ce n’est pas peu d’améliorer la prise en charge des Français.”
Repenser l’activité des pharmaciens
Le numérique a transformé l’activité des officines en interne. Les formations digitalisées se multiplient. “C’est très pratique. Ces vidéos nous permettent par exemple d’apprendre depuis chez nous, et en fonction de notre agenda”, salue Philippe Besset. Des plateformes comme ouipharma.fr permettent aussi de mettre en relation les pharmaciens pour faciliter la revente de leurs officines ou pour publier des offres d’emploi.
Avec le développement de la téléconsultation, les contours de la mission des officines ont aussi été redessinés. En plaçant le pharmacien comme premier recours des patients, 91,4 millions de visites chez le médecin pourraient être évitées chaque année selon l’association NèreS. Redonner aux pharmacies un rôle central dans le parcours de santé est donc un enjeu majeur pour désengorger les cabinets et lutter contre les déserts médicaux.
La prise de rendez-vous en ligne et le click & collect ont également remodelé la relation entre pharmacien et patientèle en permettant une meilleure organisation et donc un gain de temps des deux côtés. Face à des patients toujours plus connectés, les pharmacies s’adaptent à la demande.
La Pharmacie de demain
Les modes de consommation des Français évoluent. Et à l’heure de l’automédication et du réflexe livraison, la vente en ligne, très pratiquée chez nos voisins européens, est plus que jamais au cœur de l’équation. En 2019, elle représentait 1% du marché hexagonal, contre 15% pour l’Allemagne. Mais si la e-pharmacie est en mesure de répondre aux nouvelles attentes, pour Philippe Besset elle se doit de conserver un aspect humain et un conseil fort : “Pour des soins de qualité, rien ne remplacera jamais le lien humain."